Résumé


La campagne SMOOTHSEAFLOOR se déroulera dans la partie orientale de la dorsale sud-ouest indienne. L’objectif phare de cette campagne est de déterminer la géologie d’un nouveau type de plancher océanique « non-volcanique » découvert en 2003 lors d’une campagne précédente.

Objectifs de la campagne

La campagne SMOOTHSEAFLOOR, du 2 octobre au 2 novembre 2010 à bord du N/O Marion Dufresne, se déroulera dans la partie orientale de la dorsale sud-ouest indienne où l’Afrique et l’Antarctique se séparent avec un taux d’accrétion (15 mm/an) parmi les plus lents du système de dorsales océaniques de notre planète. L’objectif phare de cette campagne est de déterminer la géologie (la lithologie, la structuration tectonique, les modalités du magmatisme et de l’altération hydrothermale) d’un nouveau type de plancher océanique « non-volcanique » découvert en 2003 lors d’une campagne précédente (Cannat et al., 2009a; Cannat et al., 2008; Cannat et al., 2009b; Cannat et al., 2006; Sauter and Cannat, 2010; Sauter et al., 2008; Sauter et al., 2004).


Ce plancher dit « smooth seafloor » présente une morphologie très particulière, spécifique des zones pauvres en magma et inconnue sur les dorsales plus rapides. Il ne montre, à la résolution des données bathymétriques de surface, ni édifices volcaniques ni escarpements, ni autres caractéristiques morphologiques qu’une structuration générale en massifs allongés dont la texture est lisse. Des roches mantellaires y sont exhumées par un mécanisme encore très mal compris. Cette découverte va à l’encontre de la vision traditionnelle de toutes les dorsales océaniques comme un système essentiellement volcanique. L’origine de ce nouveau type de plancher océanique fait pour l’instant l’objet de nombreuses questions auxquelles la campagne SMOOTHSEAFLOOR va tenter de répondre.

Notre hypothèse de départ est que le plancher océanique de ces domaines dits « smooth » soit constitué de roches du manteau altérées (péridotites serpentinisées), avec une proportion à déterminer de roches magmatiques intrusives, et trop peu de laves pour que se forment des édifices volcaniques visibles à la résolution des données bathymétriques dont nous disposons. Notre 1er objectif est de tester cette hypothèse et de préciser les modes de mise en place et l’abondance des roches magmatiques par l’acquisition de données sonar de haute résolution (qui nous donnera des images du fond océanique à une échelle décamétrique), par le prélèvement de nouveaux échantillons de roches par dragage et leur analyse à terre, et par la recherche dans la colonne d’eau de marqueurs chimiques de la serpentinisation du manteau exhumé.
Notre 2ème objectif est de mieux comprendre l’origine des anomalies magnétiques qui sont bien marquées à l’aplomb des domaines de « smooth seafloor » malgré l’absence d’une couche volcanique conséquente qui est pourtant la source traditionnellement invoquée pour expliquer les anomalies magnétiques en domaines océaniques. Nous réaliserons des profils magnétiques proches du fond permettant une analyse fine de l’enregistrement des anomalies magnétiques, de la distribution des sources magnétiques en profondeur et de la géométrie des transitions de polarité du champ magnétique terrestre.
Notre 3ème objectif sera d’étudier les flux hydrothermaux et de préciser le contexte géodynamique et les conditions de la serpentinisation du manteau (T°, rapport fluide/roche, etc…). L’étude des échantillons dragués permettra également de comprendre le rapport entre serpentinisation, déformation et magmatisme. Nous réaliserons par ailleurs des prélèvements à différentes profondeurs dans la colonne d’eau afin de quantifier les flux hydrothermaux. La recherche de traceurs de l’hydrothermalisme sera faite à l’axe et pourra conduire à localiser des sites hydrothermaux actifs dans cette région de la dorsale sud-ouest indienne pour laquelle on ne connaît qu’un site fossile.
Ce nouveau type de plancher océanique « non-volcanique » se rapproche des formations dites de « transition continent-océan » (TOCs) des marges continentales peu magmatiques. Ce chantier peut donc être étudié également pour certains processus (notamment pour l’origine de la signature magnétique des secteurs où affleurent des roches ultrabasiques (Sauter et al., 2008)) comme un analogue actuel de ces TOCs (Cannat et al., 2009a).

Les chefs de mission/projet : Daniel Sauter (IPGS) et Mathilde Cannat (IPGP)


Références
  • Cannat, M., Manatschal, G., Sauter, D., and Péron-Pinvidic, G., 2009a, Assessing the conditions of continental breakup at magma-poor rifted margins: What can we learn from slow spreading mid-ocean ridges?: Comptes Rendus Geosciences, v. 341, p. 394-405
  • Cannat, M., Sauter, D., Bezos, A., Meyzen, C., Humler, E., and Le Rigoleur, M., 2008, Spreading rate, spreading obliquity, and melt supply at the ultraslow spreading Southwest Indian Ridge: Geochemistry, Geophysics, Geosystems, v. 9, p. Q04002.
  • Cannat, M., Sauter, D., Escartín, J., Lavier, L., and Picazo, S., 2009b, Oceanic corrugated surfaces and the strength of the axial lithosphere at slow spreading ridges: Earth and Planetary Science Letters, v. 288, p. 174-183.
  • Cannat, M., Sauter, D., Mendel, V., Ruellan, E., Okino, K., Escartin, J., Combier, V., and Baala, M., 2006, Modes of seafloor generation at a melt-poor ultraslow-spreading ridge: Gelology, v. 34, p. 605-608.
  • Sauter, D., and Cannat, M., 2010, The ultraslow-spreading southwest indian ridge, in Rona, P., Devey, C., Dyment, J., and Murton, B., eds., Diversity of hydrothermal systems on slow-spreading ocean ridges, Volume 188: Geophysical Monograph Series, AGU, p. in press.
  • Sauter, D., Cannat, M., and Mendel, V., 2008, Magnetization of 0-26.5 Ma seafloor at the ultraslow spreading Southwest Indian Ridge 61-67°E: Geochemistry, Geophysics, Geosystems, v. 9, p. Q04023
  • Sauter, D., Mendel, V., Rommevaux-Jestin, C., Parson, L.M., Fujimoto, H., Mével, C., Cannat, M., and Tamaki, K., 2004, Focused magmatism versus amagmatic spreading along the ultra-slow spreading Southwest Indian Ridge: Evidence from TOBI side scan sonar imagery: Geochemistry, Geophysics, Geosystems, v. 5, p. Q10K09, doi:10.1029/2004GC000738.